Au nord de la Colombie, là où le désert rencontre la mer des Caraïbes, s’étend la région de La Guajira, terre ancestrale des Wayuu. Mon périple à travers ces paysages sauvages m’a plongé au cœur de la culture de cette communauté indigène, où chaque geste, chaque tissage, raconte une histoire profonde et vibrante.

Mon voyage commence à Riohacha où je pars pour plusieurs jours dans la Alta Guajira avec mon guide Julian. 

Après avoir quitté la jungle de la région de Tayrona, nous observons une végétation plus désertique avec de nombreux cactus et du sable de partout. On peut également apercevoir de nombreuses chèvres au milieu de la route, dégustant les cactus. 

Nous continuons la route jusqu’au village du clan Wayuu vers Manaure où je vais passer ma première nuit dans la région. À mon arrivée, je suis accueillie par Miriam, cheffe du clan, et sa famille. Elle nous emmène rapidement dans la maisonnette faisant office de cuisine pour échapper à la chaleur écrasante. Les rancherias, ensemble d’habitations typiques de la région, sont sommaires, mais ont l’avantage de bien garder la fraîcheur. Ce sont des habitations qui existent depuis des siècles en Colombie.

Ici, Miriam me propose un café ou une aguapanela, boisson à base de sucre de canne et de citron, et on commence à échanger sur nos histoires de vie, nos similitudes, nos différences et surtout la compréhension de nos cultures. 

C’est un échange très intéressant pour moi, je découvre une nouvelle culture au sein même de la culture colombienne.

Découverte du mode de vie Wayuu

J’apprends que le clan Wayuu est régi de manière matriarcale, c’est-à-dire que la femme est la cheffe de famille. La mère transmet ensuite son pouvoir ou sa propriété aux filles de la famille pour reproduire la structure d’une famille à prédominance féminine.

Par exemple, si un homme veut demander en mariage une femme, il doit alors demander sa main à sa mère ainsi qu’au frère de la mère, mais le père n’est pas inclus. Après le mariage, l’homme rejoint le clan de son épouse.

Si un clan n’a plus de descendant de sexe féminin, il est voué à sa perte.

Au sein de la communauté Wayuu, les rôles sont répartis. Les femmes tissent et prennent soin du foyer, tandis que les hommes s’occupent du bétail et assurent la sécurité de la tribu. Cette complémentarité se manifeste également dans les décisions communautaires, où les opinions des femmes sont aussi voire plus respectées que celles des hommes.

Les femmes sont demandées très tôt en mariage, comme dans de nombreuses communautés indigènes. Miriam m’explique qu’à la différence d’autres communautés indigènes, pour pouvoir épouser une femme Wayuu, il existe un rituel de danse autour du feu. Plusieurs prétendants attendent leur tour, et au son des tambours un prétendant s’approche du feu et entame une danse à reculons effectuée en cercle, avec des mouvements fluides et synchronisés. Chaque pas de danse représente un animal et si l’homme tombe lors de la danse cela signifie qu’il n’est pas digne de la femme. Les participants sont souvent vêtus de vêtements traditionnels permettant d’accentuer les mouvements, dont le manta.

Les danses rituelles sont perçues comme des moyens de communiquer avec les esprits, de célébrer des événements importants et de renforcer les liens communautaires.

En effet, la culture des Wayuu repose beaucoup sur le spiritualisme et leurs ancêtres. Selon Miriam, la mort n’est pas simplement la fin de la vie, mais plutôt une transition vers un autre état d’existence. Leur spiritualité est basée sur la croyance en des esprits ancestraux et des forces surnaturelles qui influencent leur quotidien. Les esprits des défunts continuent ainsi d’exister dans le monde spirituel et peuvent interagir avec le monde des vivants. C’est pourquoi, à chaque cérémonie ou événement, ils incluent dans leurs pensées leurs ancêtres.

Le lieu le plus sacré dans les clans Wayuu est le cimetière. Ils sont considérés comme des lieux sacrés où les esprits des ancêtres résident. Les rituels associés aux sépultures permettent aux vivants de maintenir un lien avec leurs ancêtres et de préserver les traditions et croyances ancestrales. 

Après cet échange très enrichissant sur le mode de vie Wayuu et leur culture, Miriam m’explique l’importance du tissage dans la communauté.

L’importance du tissage traditionnel Wayuu

Celui-ci est au cœur de la vie quotidienne des femmes Wayuu. Habiles et patientes, elles transmettent ce savoir-faire ancestral de génération en génération. Assise à même le sol, sur du bois de cactus sec ou dans le hamac, elles tissent durant la plus grande partie de leur journée.

Miriam et ses filles m’enseignent alors l’art de tisser les typiques mochilas Wayuu. Ana Luisa, la troisième fille de Miriam, m’aide à créer ma première petite mochila pendant que Miriam termine la sienne. Je choisis la couleur et elle me donne le crochet. J’apprends que chaque couleur a une signification. Les couleurs les plus importantes étant le rouge symbolisant la passion, mais aussi la mort, et le noir symbolisant la nuit et donc les rêves qui ont une grande importance pour la communauté.

Chaque fil semble porter en lui les récits et les croyances du peuple Wayuu, une fenêtre sur leur histoire millénaire.

Balade entre les rancherias Wayuu

Nous terminons la journée par une visite des autres rancherias du clan. C’est une balade entre les cactus et les chèvres au coucher de soleil, avec un vent rafraîchissant. Je discute avec Maria qui fait des hamacs et d’autres œuvres à base de fil de seconde main. Elle récupère du fil de pull puis le roule sur sa jambe pour qu’il soit plus épais. On continue la visite et on joue avec les fils d’Ana Luisa au football. La balle est faite de peluches d’habits déchirés mise dans un sac en plastique puis refermée au feu. J’ai l’impression d’avoir fait une pause dans ma routine quotidienne pour apprécier ces moments uniques partagés avec Osmer et Jhonervis.

Lorsque l’on revient à notre rancheria, j’aide à préparer le dîner qui sera à base de salade de carottes et tomates, riz, manioc et viande de chèvre cuit au charbon de bois. Nous dînons avec quelques lumières à la nuit tombée puis nous écoutons les légendes et mythes de la communauté Wayuu qui me préparent pour mon voyage du lendemain jusqu’à Cabo de la Vela.

Nuit à la belle étoile dans la Guajira

Après notre dîner, typique de la région, nous installons nos hamacs pour pouvoir dormir à la belle étoile. Avant de me coucher, on me rappelle qu’il faut que je me souvienne des rêves que je fais, car ceux-ci ont une grande importance dans la culture Wayuu. 

Je suis réveillée au lever de soleil, par un coq que je n’avais pas vu la veille, qui me permet d’observer les superbes couleurs du matin dans la Guajira. Nous préparons le petit-déjeuner en cuisinant des arepas au charbon de bois avec un pericos : œufs brouillés mélangés avec des tomates et oignons nouveaux.

Après le petit-déjeuner, nous partons pour Cabo de la Vela. Sur la route, je repense à cette expérience forte en émotion et ces échanges enrichissants avec Miriam qui m’ont permis de mieux comprendre la culture Wayuu.

Mon voyage dans La Guajira m’a permis de découvrir une culture riche et complexe, où le tissage des mochilas n’est qu’une facette parmi tant d’autres. Chaque rencontre avec les Wayuu m’a appris l’importance de préserver sa connexion avec ses ancêtres et de rester ouverts aux autres cultures.

Vivre au rythme des saisons et des cycles naturels est au cœur de la vie des Wayuu. Le jour, le désert brûle sous un soleil implacable, mais la nuit apporte un soulagement bienvenu, avec ses ciels étoilés et sa brise marine rafraîchissante. Les villages, semblent fondus dans le paysage, témoignant d’une harmonie entre l’homme et son environnement.

 

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